- Wild Spirits -
26 janvier - 2 février 2020
BRAFA 2020, Bruxelles, Belgique
À l’occasion de la BRAFA 2020, Charles-Wesley Hourdé aura le plaisir de présenter une exposition transversale - intitulée Wild Spirits - prenant pour thème le masque animalier en Afrique de l’Ouest. L’exposition mettra en regard un ensemble de masques de bois, issus de traditions séculaires, avec les photographies contemporaines de Fatoumata Diabaté, qui, en travaillant sur le portrait masqué, montre la pérennité d’un héritage culturel dans la société malienne.
Associant audacieusement des pièces réalisées à plus d’un siècle d’écart, c’est le rôle déterminant de ces entités surnaturelles zoomorphes, dont la force symbolique imprègne l’ensemble des croyances et légendes des peuples d’Afrique occidentale, que l’exposition Wild Spirits se propose de mettre en lumière.
Les masques animaliers d’Afrique accrochent l’oeil autant que l’esprit: à leur remarquable variété de formes répond la profondeur symbolique de chacune d’entre elles. Quelle que soit la manière dont il est traité, le motif animalier signifie, et transcende la seule apparence de la créature qu’il représente. En empruntant à l’hyène, au chien, au léopard, à l’éléphant leur apparence, partiellement ou entièrement, le sculpteur cherche non pas à copier la nature mais à matérialiser l’invisible. Ces créatures zoomorphes, qui sont moins des animaux à proprement parler que des entités surnaturelles mythiques, incarnent un ensemble d’idées et de valeurs encodées.
La réalisation de ces masques, ainsi que leurs apparitions dansées, offraient aux sociétés d’initiés l’occasion d’entrer en contact avec les forces de la nature et de se concilier leurs pouvoirs. Ainsi canalisées, elles pouvaient soigner, protéger, rendre justice. Capables de bien comme de mal, les masques étaient l’objet du plus grand respect. Ils expriment, par leurs formes autant que par la performance et le costume de leur danseur, l’importance-clé de l’animal comme modèle, symbole et médiateur.
Dans l’ensemble des cultures, le rapport à l’animal porte l’empreinte de représentations fortes. Observé, chassé, imité, l’animal est une force de la nature que l’homme a cherché à se concilier et à s’approprier. Au sein des traditions africaines, il est le sujet de légendes et de proverbes qui, s’ils peuvent sembler ludiques, n’en visent pas moins à éduquer, initier et édifier. C’est ce que traduit, dans sa série intitulée L’homme en animal, la photographe contemporaine malienne Fatoumata Diabaté.
Née en 1980, Fatoumata Diabaté travaille entre Montpellier et Bamako. La série L’homme en animal, photographiée en 2011 et 2013, propose un ensemble de portraits d’enfants masqués. Aux singes, lions, lapins et serpents répondent diables et mendiants, chacun produisant sa propre fable, dépourvue de mots. Ils semblent constituer les différentes facettes d’un même récit, dont les ramifications sont à trouver dans les rites séculaires et les traditions orales. Au-delà de la jeunesse des modèles et du caractère ludique de leur mascarade, c’est une autre histoire qui s’écrit. Ces portraits aux visages dérobés, d’une saisissante présence, offrent plus que la seule image de l’enfance: plastiquement et intellectuellement, ils sont en filiation directe avec un ensemble de traditions.
À travers ces masques et ces mises en scène, c’est la puissance symbolique des anciennes processions que l’on voit transparaitre. Présentés et incarnés avec gravité par leurs porteurs, ces masques de papier, de tissu et de carton sont autant de réminiscences culturelles. Et dans le contexte contemporain, ces portraits se chargent en dernier recours d’une pluralité de sens, à la portée plus vaste. Ils sont, pour reprendre les mots du critique Yves Chatap, des miroirs tendus à notre condition humaine.
À travers la mise en regard de ces pièces contemporaines et de masques anciens, c’est tant la richesse esthétique du motif animalier que sa remarquable puissance d’évocation que l’exposition Wild Spirits se propose de célébrer.